Chapitre 1. Présentation

J’ai décidé d’écrire ce journal intime / autobiographie / roman / pamphlet (on verra…) afin d’exprimer mon impuissance, mon désarroi, par rapport à une situation absolument rocambolesque que je vis présentement. J’imagine que ça me fera le plus grand bien. C’est vraiment la seule idée qui m’est venue afin d’apprivoiser mes frustrations et mon incrédulité.

Je vais prendre un peu de recul par rapport à la situation actuelle, afin de bien vous faire comprendre le contexte. J’espère que rapidement, je pourrai raconter les événements au fur et à mesure qu’ils se présentent, alors je ne vais pas remonter trop loin en arrière. En fait, je vais d’abord me présenter en quelques pages et ensuite vous raconter cette histoire de fou à partir de ce que je considère être le déclenchement de l’avalanche, il y a de ça un peu plus de deux semaines.

Mon nom est Jean-François Lahaie, on m’appelle Jeff. Je sais, ce n’est pas très conséquent pour un québécois francophone nationaliste de se faire appeler Jeff, mais on m’a toujours nommé ainsi, alors j’ai abdiqué devant la pression sociale imposée. Je me dis que des fois, il faut choisir ses causes et que si je menais ce combat, ça boufferait bien trop de mon temps pour le peu de retombées que ça amènerait…Peut-être ai-je tort, peut-être que cette abdication teinte à jamais tout autre combat nationaliste que je pourrais mener…Mais ne nous étendons pas trop. J’ai 27 ans, j’habite la ville de Québec dans un 3 1/2 demi-sous-sol, pas très loin de l’université Laval où je termine un doctorat en génie électrique. Non, je ne suis pas un nerd; en tout cas, pas d’après moi. J’ai amorcé la rédaction de ma thèse et ça avance relativement bien. C’est peut-être ce qui m’a donné le goût d’écrire. En tout cas, j’ai mis cette rédaction sur la glace en attendant de me sortir de ce pétrin. De toute façon je n’arrivais plus à me concentrer là-dessus. Ma rédaction se fait à l’appartement, seul dans mon petit coin, c’est peut-être un peu pourquoi je capote tellement. La solitude a souvent chez moi comme conséquence d’amplifier les sentiments. Ma solitude est relative évidemment, je vais régulièrement à l’université voir mes potes et mon directeur de thèse; au moins 2 fois par semaine. Je fais du sport d’équipe pendant les sessions d’hiver et d’automne, je joue au basket-ball et au volley-ball à chaque semaine; à un niveau respectable, dois-je le préciser. J’ai une blonde… l’endroit où je situe celle-ci dans ma nomenclature vous donne une idée du sérieux de notre relation… De toute façon, cette relation tire à sa fin, la jeune dame n’a pas bien réagi à la « situation ». Mon voisin d’appart, Sean, est un bon copain. Enfin il l’était! Il est directement lié à la dite « situation » et on en reparlera. J’ai rencontré ce dernier en Australie, à Sydney, lors d’une conférence qui se tenait là-bas (un avantage important du monde de la recherche scientifique sont ces voyages à travers le monde pour assister à des conférences où on rencontre toutes sortes de monde trippant). Cette conférence a été suivie d’une visite scientifique de 2 mois, dans son laboratoire, pour un projet de collaboration entre nous. Il est originaire d’Australie et notre lien d’amitié a mené à ce qu’il s’arrange pour faire un stage postdoctoral dans le même laboratoire où je complétais mon doc. Je suis moi-même originaire de Montréal où j’ai fait mon baccalauréat en génie physique à l’École Polytechnique. J’ai déménagé à Québec il y a environ 4 ans pour y entreprendre mes études graduées (diplômées en bon français). Dans mon domaine, la photonique, l’université Laval est un leader mondial. J’aime bien Québec, mais je me dis quand même que j’ai été chanceux de grandir à Montréal. Comment aurais-je pu apprendre l’anglais correctement et être en contact avec une si riche multi-culturalité si je n’avais pas grandi à Montréal? Toute ma famille demeure encore dans la région de Montréal, sauf une de mes sœurs, qui habite à Charlevoix, mais je n’élaborerai pas sur ces derniers car je crois qu’ils n’auront pas de rôle direct à jouer dans la description de l’aventure à venir. En conclusion, j’aime bien Québec, mais je demeure un vrai partisan des Canadiens.

Je suis le genre de gars qui aime bien l’introspection, un peu de philosophie. J’aime avoir des discussions animées avec les ami(e)s au sujet des valeurs de la société, de la mort, de la politique…j’aime bien refaire le monde devant une bière. C’est d’ailleurs un peu ce qui m’a mis dans le trouble. Je mesure 6 pieds 2 (ça veut dire 1,85 m à peu près je crois) et je pèse 190 livres. J’ai les cheveux bruns, les yeux bleus, la mâchoire carrée, le nez plutôt long. Je ne suis pas gros, plutôt musclé, et on me dit beau bonhomme. Ça n’a rien à voir avec le sujet qui nous intéresse, mais ça me fait plaisir d’en parler. On a tous notre orgueil quand même. Je suis un quasi homme moderne. C’est-à-dire que je fais la bouffe, la vaisselle, le ménage, toute la bastringue; mais je n’aime pas ça. Faire la bouffe, c’est un peu mieux. Des fois je me prends pour un grand chef et j’essaie de créer de nouvelles recettes, mais la plupart du temps c’est pas mangeable. Les fois où c’est bon, je n’arrive pas à reproduire parfaitement la recette miracle, car je ne note jamais les quantités et les ingrédients utilisés; un artiste doit avoir toute sa liberté pour créer. Je n’aime pas magasiner. Je m’habille en jeans et t-shirts le plus souvent possible. Je suis propre de ma personne (c’est une farce au bénéfice de ma môman!). Je me rase aux deux jours, à moins d’avoir de la visite ou de participer à une conférence ou une réunion importante. Je ne suis pas riche, mais j’ai obtenu des bourses intéressantes qui font que je vis bien, tant et aussi longtemps que je me contente de mon appart et de mes meubles usagés. Je tiens quand même à souligner que je me suis permis l’achat de quelques meubles IKEA pour démontrer au monde entier toute ma dignité. Je sors de temps en temps, prendre une bière, deux bières. J’exagère rarement. C’est pas facile d’écrire ou de faire des manipulations en laboratoire avec la gueule de bois. Je suis un grand sensible, bien que je le cache relativement bien. J’ai une grande gueule quand je suis entre ami(e)s; mais dans le public en général, je prends mon trou. Je suis plutôt gêné et pissou. J’ai un certain côté romantique (j’ai déjà écrit des poèmes à ma blonde). Je ne suis pas vraiment drôle, ce qui ne m’empêche jamais d’essayer de l’être. Je dors beaucoup (en moyenne 9 heures par jour), je mange beaucoup, je bouge beaucoup (même si j’écoute beaucoup trop la télé) et je suis du genre assez stressé, mais je demeure un éternel optimiste... bien que je sois un éternel inquiet. Est-ce que ça se peut tout ça? Il me semble que ce n’est pas très cohérent.

J’aime bien faire l’amour à ma blonde, mais je suis capable de m’en passer sans trop d’effort. Je ne me sens pas tout à fait normal par rapport à ça, mais je n’en fais pas de cas et je n’en parle jamais à personne. Vous êtes les premiers à l’apprendre mes chanceux! Je crois être un amant correct, c’est ce que mes partenaires m’ont laissé entendre en tout cas, mais je n’en ai pas eu tant que ça avec lesquelles je suis passé à l’acte; trois en tout jusqu’à maintenant. À chaque fois que je commence une relation avec une nouvelle blonde, je crois que c’est le grand amour et que ça y est. Avant Catherine, ça m’a toujours pris environ 2 mois à dégonfler ma balloune et à me permettre de me demander si je ne me trompais pas finalement. Je sors avec Catherine depuis 2 ans. C’est une fille trippante, intelligente, drôle, qui me fait vivre plein de nouvelles expériences de plein air. Mais la passion n’est pas là. C’est une super amie avec qui je fais l’amour de temps en temps. J’imagine qu’il faut plus que ça. J’ai l’impression qu’elle est à peu près au même point que moi et que l’on reste ensemble parce qu’on n’a pas la motivation et le temps nécessaire à consacrer à la recherche d’un nouveau conjoint. Si l’un ou l’autre d’entre nous rencontrions quelqu’un qui nous ferait frétiller, et que cette personne semblerait frétiller en retour, c’est certain que ce serait adios le couple Jeff-Catherine.